Voici, comme annoncé hier, un développement plus complet concernant le point n°6 de l’ordre du jour du prochain conseil municipal. Il s’agit de la constitution d’une servitude de passage sur des parcelles appartenant à la ville, au profit d’une parcelle appartenant à des propriétaires privés (voir ci-dessous le texte intégral du point n°6 dans le rapport de synthèse, tel qu'il est publié sur le site internet de la ville à ce jour).
Comme chacun peut le remarquer, ce texte soumis au vote des élus ne fait aucune référence à un prix, ni à un quelconque avis des Domaines. A sa lecture, le public, qui n'a aucune autre source d'information, ne peut qu’en conclure que cette constitution de servitude s’opère à titre gratuit. Et ce sans qu’il soit de plus précisé qui aura à sa charge les frais de géomètre et de notaire nécessaires à la constitution de cette servitude. Surprise ! Renseignements étant pris auprès de sources dignes de confiance, il s'avère que cette constitution de servitude s'opère non pas à titre gratuit mais à titre onéreux. Il s'avère aussi que tous les frais sont à la charge des bénéficiaires. Reste à savoir pourquoi ces deux informations ne figurent pas sur le document accessible au public avant la séance du conseil. Et ce alors que dans les trois autres affaires foncières à l'ordre du jour, les prix sont clairement mentionnés. Reste aussi à savoir ce qui justifie que la ville concède ainsi une servitude de passage sur des parcelles lui appartenant.
La parcelle en question (AE 109) n’est en apparence nullement enclavée, comme le montre le plan ci-dessous. Elle dispose de deux accès : l’un par la rue du Général Drouot, et l’autre par la rue du Général Moreau. Le trait pointillé orange matérialise, de façon approximative, le tracé probable (en tout cas le plus logique, au plus près de la voie ferrée) de la servitude projetée sur les parcelles municipales. La parcelle AE 109 est inscrite au PLU en secteur UE, secteur dans lequel la construction de logements est interdite. Or il se trouve que dans ce secteur, la largeur minimale des voies de desserte doit être de 5 mètres. Ce qui n'est pas le cas des rues Drouot et Moreau. Sans être enclavé, le terrain en question se trouve néanmoins être inconstructible. Et ne peut donc servir à rien d'autre qu'un usage de pré à vaches, moutons, chèvres ... etc. La constitution de cette servitude vise donc clairement à rendre constructible un terrain qui, eu égard au règlement du PLU, ne l'est pas. Donc à transformer un terrain qui vaut 2 euros le m² en un terrain qui en vaut au minimum 25 fois plus. Autrement dit à lui faire prendre plus de 350.000 euros de valeur supplémentaire. Pour quel projet immobilier ? Mystère et boule de gomme ! Espérons que le conseil de lundi prochain permettra de lever le voile sur ce mystère. Mais gageons aussi que la majorité ne lèvera pas spontanément le voile en question.
RETOUR VERS LE PASSÉ
Bon, vous vous doutez peut-être que si on a choisi de vous parler un peu plus longuement de ce point de l’ordre du jour du prochain conseil, ce n’est pas pour les quelques « broutilles » ci-dessus. Non, si on a choisi de mettre un coup de projecteur sur ce point, c’est qu’il nous en rappelle un autre. Bien plus ancien. Et que la comparaison est intéressante à faire.
En décembre 2001, Dord et sa majorité d’alors décident de céder près de 3 hectares de terrains en bordure du bois Vidal à une petite SCI locale ne comptant aucune réalisation d’envergure à son actif. A en croire Dord et son adjoint de l’époque, les acquéreurs sont porteurs d’un projet grandiose, alliant thermalisme, industrie cosmétique, services et commerces et résidence de tourisme. 10 ans plus tard, même les plus sceptiques sont forcés de reconnaitre que tout ceci n’était que de la poudre aux yeux. En témoigne l’absence totale d’une quelconque réalisation sur les terrains en question. Dans l’histoire, la ville a irrémédiablement perdu 3 hectares de terrains magnifiques, à deux pas du centre ville, avec en partie vue sur le lac, et qui plus est vendus pour un prix dérisoire (15 euros/m²). Mais ce n’est pas tout. En juin 2006 (4 ans ½ après la délibération, c’est dire s’il n’y avait aucune urgence à délibérer en 2001 contrairement à ce qui a été dit aux élus), quand Dord signe l’acte notarié, apparait soudainement dans ce dernier la constitution, à titre gratuit, de servitudes de passage sur d’autres parcelles restant appartenir à la ville. Parcelles qui, au moins pour partie, du fait de ces servitudes, se trouvent désormais impropres à tout autre usage.
Or, au moment de la signature devant le notaire, la constitution de ces servitudes n’avait pas été soumise au vote du conseil municipal. Pas plus qu'elle n'avait été soumise à une estimation financière des Domaines. On voit pourtant bien, au travers de la délibération proposée au vote des élus le 20 juin prochain, que c’est bien en amont et non en aval de la constitution de servitude qu’il faut obtenir une approbation du conseil municipal, ainsi qu'une estimation de valeur de la part des services de l'Etat. Ceci afin que les élus puissent prendre une décision en toute connaissance de cause.
Dans le cas des terrains cédés en 2001, ça n’a pas été le cas. Les élus n’ont été appelés à se prononcer sur la constitution des servitudes que 5 ans après la délibération de vente, lors du conseil de novembre 2006. Soit 5 mois après la signature de l’acte notarié, premier document sur lequel ces servitudes apparaissent. En clair, ils ont été mis devant le fait accompli. Et, bien que le projet grandiose qui leur avait été annoncé 5 ans plus tôt n’ait toujours pas vu le jour, et bien que rien ne pouvait laisser présager de sa réalisation future (bien au contraire), les élus de la majorité ont choisi de ne pas réagir. Quant au service des Domaines, il n'a purement et simplement jamais été consulté sur la valeur des servitudes. Pire, l'acte de vente de 2006 a même été signé, concernant le prix des terrains eux-mêmes, sur la base d'une estimation périmée depuis plusieurs années.
Dans cette histoire, la ville a perdu 3 hectares de terrains vendus à bas prix. Elle a aussi perdu l’usage de plus de 2 hectares d’autres terrains restant à lui appartenir, mais désormais grevés par des servitudes rendant tout autre usage impossible. Des servitudes concédés à titre gratuit, sans que cette gratuité ne soit le moins du monde motivée par un quelconque argument. Sans que les élus soient appelés à se prononcer. Sans même qu'ils en soient informés. Et sans que le service des Domaines ne soit appelé à donner son avis quant à cette gratuité. Et, cerise sur le gâteau, sans que les acquéreurs ne soient tenus par un quelconque engagement quant à la nature et au délai d’une éventuelle réalisation sur ces terrains.
La première grande opération immobilière de l’ère Dord se solde aujourd’hui par un échec sur toute la ligne. Une opération dans laquelle la municipalité et son nouveau maire ont accumulé les erreurs plusieurs années durant. Si tant est qu’il s’agisse bien d’erreurs … Et une question demeure en suspens : pourquoi les propriétaires de la parcelle AE 109 du côté de Saint-Simond vont-ils devoir payer pour que la ville leur concède une servitude de passage, alors que les propriétaires des terrains du bois Vidal ont eu le droit à la même chose, mais gratuitement. Et qui plus est sur une surface bien plus importante. A la place des propriétaires de Saint-Simond, on n'hésiterait pas une seule seconde à réclamer une juste égalité de traitement. Egalité qui, pour être juste envers les citoyens, ne peut se traduire autrement que par le fait de faire payer les servitudes du bois Vidal.
Petit résumé comparatif entre les deux opérations, sous forme de tableau :
Bois Vidal (Crémaillère) | Saint-Simond (AE 109) | |
Surface des parcelles sur lesquelles passe les servitudes | 20.777 m² | 2.786 m² |
Surface approximative des servitudes concédées | 5.900 m² | 680 m² |
Fonds servant (les parcelles sur lesquelles passent les servitudes) toujours utilisables pour d'autres usages | NON | OUI |
Avis des Domaines fixant le coût de la servitude | PAS DEMANDÉ | OUI |
Coût des servitudes | GRATUIT | 5.000 euros |
Approbation préalable de la constitution des servitudes par le conseil municipal | NON | OUI |
LE MOT DE LA FIN
Il concerne une autre bizarrerie de la vente des terrains du bois Vidal en décembre 2001. Comme indiqué plus haut, cette vente n'était assortie d'aucune obligation pour les acheteurs de réaliser un quelconque projet. La délibération ne fixait aucun délai. Pratique pourtant courante et habituelle, qui permet aux communes d'éviter la spéculation foncière. Mais là, rien. Les acheteurs ne sont tenus à rien. Une situation à comparer avec la vente des terrains à l'OPAC, également soumise au vote des élus lundi prochain. Quand aucun délai n'a été imposé aux acheteurs des terrains du bois Vidal, l'OPAC se voit imposer un délai maximal de 73 jours (!) pour déposer son dossier de permis de construire. A défaut de quoi la ville se réserve le droit de renoncer à la vente. Une fois de plus, comment ne pas s'étonner de cette extraordinaire différence de traitement.
commenter cet article …