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12 mars 2012 1 12 /03 /mars /2012 07:46

La décision prise par le tribunal administratif de Grenoble jeudi dernier (8 mars), vient de jeter le belvédère de la Chambotte en plein dans la tourmente. Racheté par la CALB (communauté d’agglomération du lac du Bourget), théoriquement avec la participation financière de la CCCA (communauté de communes du canton d’Albens) en 2008, l’ancien restaurant panoramique vient tout juste d’être rasé, en vue de sa reconstruction. Qui a d'ailleurs commencée. Aussi curieux que cela puisse paraitre, l’annulation des délibérations des deux collectivités, autorisant ce rachat, n’entraine pas obligatoirement l’annulation de l’acte de vente qui en a découlé.

 

 ChambotteVueLac.jpgMagnifique vue sur le lac depuis la Chambotte. Mais saurez-vous dire si cette photo a été

prise de la terrasse de l’ancien restaurant, ou bien d’ailleurs ? (réponse plus loin dans l’article)

 

Quelques brefs rappels

Propriété de la famille Lansard, le restaurant du belvédère de la Chambotte était devenu trop vétuste, pour ne pas dire insalubre. Une société privée, dénommée le Rocher de la Chambotte, a proposé de racheter le site. Et même signé un compromis de vente. Mais se serait ensuite vue refuser son permis de construire, ce qui aurait entrainé la nullité du compromis. C’est dans ce contexte que la CALB et la CCCA se sont portées acquéreuses du site. Une majorité des élus de la CALB s’est prononcée en faveur de cette opération en novembre 2007. L’acte notarié de vente a été signé en mars 2008. Et en mai 2008, la CCCA a entériné le principe d’une participation financière à hauteur de 30% pour ce rachat, mais aussi pour les travaux à réaliser. Ce sont les deux délibérations de 2007 et 2008 que le tribunal administratif vient d’annuler.

 

 

Suivez le guide !

Et c’est là que les choses se compliquent. De prime abord, elles paraissent simples. Pour pouvoir acheter le site, la CALB avait besoin que ses élus adoptent une délibération en ce sens. Ce qui a été fait fin 2007. La dite délibération se trouvant annulée par le tribunal administratif, le quidam peut se dire que la CALB n’était donc pas fondée à acheter le site, et que par conséquent l’acte de vente de mars 2008 est nul et non avenu. Eh bien non ! Car la justice administrative et la justice civile sont deux mondes bien distinct. Presque hermetiquement clos l'un à l'autre. Chacun ses compétences, mais les vaches ne sont pas pour autant bien gardées. Les délibérations de la CALB et de la CCCA sont des actes administratifs. Pour en obtenir l'annulation, il fallait donc présenter un recours devant le tribunal administratif. C'est ce qui a été fait. Avec le succès que l'on connait.

 

L'acte notarié de vente entre les anciens propriétaires et la CALB relève lui du droit civil. Il est donc hors du champ de compétence du tribunal administratif. S'il veut en obtenir l'annulation, le requérant contre les délibérations des deux collectivités devra à nouveau porter l'affaire en justice. Mais cette fois devant le tribunal de grande instance.

 

Résumons. Pour pouvoir acquérir le site de la Chambotte, les élus de la CALB devaient prendre une délibération. C'est ce qu'ils ont fait en 2007.L'acte de vente a ensuite été signé au vu de cette délibération. Mais pour autant, l'annulation de la dite délibération n'entraine pas l'annulation de l'acte de vente. Dit autrement, la CALB n'avait pas le droit d'acheter le site de la Chambotte, mais elle en demeure quand même la propriétaire légale. Un rien ubuesque vous ne trouvez pas ?

 

L'avenir se chargera bien tout seul de nous dire ce qu'il nous réserve. Mais, à vrai dire, on ne voit pas pourquoi le requérant qui vient d’obtenir gain de cause devant le tribunal administratif s’arrêterait en si bon chemin (lire à ce sujet notre article de demain).

 

 

 

1,2 M€ pour un restaurant insalubre qui doit être rasé !

Le site a beau offrir une vue somptueuse, on a un peu de peine à croire qu’il valle le prix payé par la CALB. Enfin, par ses contribuables. 1,2 M€ pour un bâtiment insalubre juste bon à être rasé, vous ne trouvez pas que cela fait un peu beaucoup ? A titre de comparaison, les élus municipaux aixois ont récemment accepté de céder une ancienne ferme de 150 m² appartenant à la ville, implantée en bordure du golf sur 1.500 m² de terrain, pour seulement 150 K€. Le bâtiment n’étant lui pas à raser, mais juste à rénover. Le grand écart entre les deux valorisations surprend pour le moins. Pour justifier de la faiblesse du prix consenti pour la cession de la ferme Balmont Cadoux, Dord a fait état d’un argument choc : personne ne voulait l’acheter, alors on doit s’estimer heureux d’avoir trouvé un acheteur à ce prix.

 

Par un étrange retournement de situation, cet argument qui aurait très bien pu s’appliquer à la Chambotte ne l’a pas été. Là non plus, les éventuels acquéreurs ne se bousculaient pas au portillon. La CALB et la CCCA ont pourtant accepté de payer le prix fort.

 

On peut aussi faire une autre comparaison sur le prix. En juin 2006, Dord signait l'acte de vente de 3 hectares de terrains municipaux situés en bordure du bois Vidal, à deux pas du centre ville. Prix de cession consenti : 15 euros le m². Difficile de croire qu'un terrain situé sur le sommet perdu de la Chambotte, soumis aux contraintes de la loi littoral, et comportant qui plus est un bâtiment devant être rasé (ce qui a nécessité 400 K€ de travaux), puisse coûter plus cher que les terrains du bois Vidal. Et pourtant. Et pourtant la CALB a payé le site de la Chambotte 1,2 M€ pour 6.358 m² de terrain. Soit plus de 188 euros le m². 12,5 fois plus cher ! Encore un mystère de l'immobilier à la sauce Dord (avec des vrais morceaux de Giroud dedans) ?

 

 

Sauver le site de la privatisation ?

C’est l’argument avancé aujourd’hui par la CALB. Il faut « préserver la Chambotte » coûte que coûte. Comprenez quoi que cela coûte … aux contribuables du coin. Pourtant, la vue depuis la terrasse du restaurant n’a jamais été ouverte au public. Mais uniquement à la clientèle. Pour voir, il fallait boire. Ou manger. Et donc payer. Un éventuel rachat par une société privée n’aurait fait que pérenniser une situation existante. L’argument de la préservation publique a donc bien du mal à tenir. Même si l’idée d’ouvrir une terrasse réellement publique, avec un libre accès, est louable. On peut cependant se demander si cela vaut les 2,5 M€ d’investissements nécessaires.

 

D’autant que, comme on peut le voir sur cette photo aérienne, le site offre à peu de distance un belvédère public, librement accessible, et proposant une vue tout aussi somptueuse (zone cerclée en bleu). On a bien du mal à imaginer que son aménagement (barrière, chemin d’accès …) aurait coûter 2,5 M€.

ChambotteVueAerienne.jpg

 

 

Ce qui est sûr, c’est que le Conseil Général ne s’en mêlera pas

Dominique Dord affirme avoir deux pistes à l’étude pour poursuive le projet. Dont une, la première, serait sa reprise par le Conseil Général. Voila ce qu’on peut sans conteste qualifier de fausse piste. Ou encore de leurre. Destiné à faire croire au public qu’il y aurait un choix possible. Or, en réalité, ce choix là ne s’offre pas à la CALB. Le Conseil Général vient en effet de trouver un accord avec les assurances à propos du restaurant les Cistudes, dans la zone des Mottets. Ravagé par un incendie en 2007, le restaurant attendait en l’état qu’assureurs et propriétaire trouvent un terrain d’entente. C’est désormais chose faite. Et le Conseil Général vient d’annoncer que le restaurant allait être rasé, et qu’il ne serait pas reconstruit. « Parce que le rôle du département n’est pas de faire fonctionner des restaurants », a expliqué le directeur général des services du Conseil Général. On voit mal comment cet argument pourrait être valable aux Mottets, et ne pas l’être à la Chambotte.

 

Au passage, on peut aussi se demander si l’argument en question n’est pas tout aussi valable pour la CALB et la CCCA. Le Conseil Général a autant, si ce n’est plus que les deux collectivités locales, une compétence en matière d’aménagements touristiques. Alors si son rôle n’est pas de faire fonctionner des restaurants, pourquoi serait-ce celui de la CALB et/ou de la CCCA ?

 

 

Le Rocher de la Chambotte

Sous ce nom se « cache » une petite SARL unipersonnelle, au capital de 7.000 euros, et domiciliée à Saint Germain la Chambotte. C’est cette société qui est à l’origine du recours, gagné, devant le tribunal administratif. Une petite société sans la moindre réalisation à son actif et qui aurait été porteuse d’un projet grandiose (la CALB parle de « véritable palais »), voila qui n’est pas sans rappeler une autre affaire immobilière aixoise. On veut parler des terrains de la Crémaillère, en bordure du bois Vidal. Vendus dans l’urgence en 2001, et pour un prix dérisoire, par Dord et sa majorité à la famille Garancini. Soit disant pour un projet pharaonique d’industrie cosmétique, de résidence hôtelière et thermale, de commerces, de restaurants … etc. 11 ans plus tard, les terrains sont toujours vierges de toute construction. Leurs propriétaires attendant sans doute une modification du PLU pour encaisser le jackpot Pour l'actionnaire du Rocher de la Chambotte, le jackpot pourrait bien venir à plus brève échéance. Même s'il devrait être d'un montant plus modeste.

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commentaires

V
<br /> Si j'ai bien suivi cette histoire telle que la raconte la presse électronique, Dord qui s'était dit contre le projet 2007 tout en votant pour par procuration, se déclare aujourd'hui prêt à<br /> "sauver la Chambotte coûte que coûte". Et nous, pauvres contribuables de la CALB, qui va nous sauver de ces Giroud(ettes) ?<br />
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