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20 septembre 2010 1 20 /09 /septembre /2010 07:45

CourrierConservatoire19082010.jpgLe conservatoire municipal de musique et d’art dramatique d’Aix les Bains est-il victime de son succès ? C’est en tout cas ce qu’on peut comprendre à la lecture du courrier adressé mi-août par son directeur aux parents d’élèves, ainsi qu’aux élèves adultes.

Dans ce courrier, Marc Lefebvre explique qu’en raison des fortes demandes dans l’ensemble des disciplines, les élèves déjà inscrits pour l’année 2009/2010 demeuraient prioritaire pour leur réinscription, mais jusqu’au 31 août seulement. On peut aussi y lire que cette année, chaque élève sera limité à la pratique d’un seul instrument en cours individuel. Y compris pour les personnes qui en pratiquaient deux (voire plus) l’an dernier et qui sont donc tenues de faire un choix pour ne garder plus qu’un seul instrument.

Cette décision, le directeur du conservatoire l’a apparemment pris seul. Sans consulter en tout cas le conseil d’administration de l’établissement. Ca fait un peu désordre, et la façon de faire est un brin cavalière. Tant à l’encontre des membres du CA que des élèves, mis sur le tard devant le fait accompli. Et, si on a bien tout compris, le choix du directeur serait motivé par la décision du conseil général de supprimer une partie (10.000 euros) des subventions qu’il verse au conservatoire d’Aix les Bains. Motif invoqué pour cette suppression, le conservatoire accueille trop d’adultes. Il y aurait, pour le conseil général, 90 élèves adultes « surnuméraires ». Sans que l’on comprenne très bien en quoi ils seraient « en excédent ». Reste que pour récupérer cette part de subvention, le directeur a choisi de trancher dans le vif (de dégraisser le mammouth ?). Et du coup de prendre le risque de se priver des recettes apportées par 90 élèves adultes suivant un second cours individuel. Recettes qui se montent à peu près à … 10.000 euros ! Une « opération blanche » comme Dord les affectionne tout particulièrement. Avec, à la clé, des perdants : les aixois !

 

Pourtant, on ne peut que se réjouir de voir cette structure culturelle aixoisie être assaillie de demandes. Cela démontre qu’en matière de loisirs et de culture, les aixois et leurs voisins des communes environnantes ne jurent pas que par les sorties Mac Do + blockbusters du cinéma américain. Un état de fait que vient également confirmer un autre succès : celui de l’école de musique DEVA.

Outre l’engouement des aixois pour la pratique musicale, le conservatoire doit sans doute aussi en partie son succès à sa politique tarifaire. On a suffisamment (et à juste titre) brocarder la politique tarifaire des services à la population pratiqués à Aix (on pense notamment aux tarifs des cantines scolaires) pour ne pas dire ici que les tarifs du conservatoire défient la concurrence de ceux de pas mal de communes, et encore plus ceux d’écoles privés (y compris associatives). Et qu’ils sont en plus socialement justes, avec pas moins de six tranches en fonction du quotient familial.

Autre raison du succès, la diversité des pratiques musicales possibles. Si côté instruments c’est assez classique, côté orchestre, la diversité est au rendez-vous et chacun peut y trouver son compte ou presque : baroque, harmonie, musiques de film, jazz sous différentes formes … etc. Certains puristes (sans donner à ce mot une quelconque connotation négative) regretteront sans doute qu’à trop s’éloigner de la musique dite classique, le conservatoire perd son âme. On se permet de ne pas partager ce point de vue. La musique est une chose vivante. En jouer est un plaisir. Et ce plaisir évolue avec les époques : la musique classique du 18ème siècle n’a pas grand-chose à voir avec celle de la Renaissance par exemple.


Bon, tout ceci est bel et beau, mais quelles perspectives cela ouvre-t-il pour l’avenir ? Que le conservatoire soit aujourd’hui victime de son succès, mais aussi de la politique du conseil général, au point de devoir restreindre les élèves à la pratique d’un seul instrument, c’est une chose que l’on peut comprendre. Mais à condition que cette situation ne se pérennise pas. Autrement dit à condition qu’au plus tard l’année prochaine, le nécessaire ait été fait pour qu’à nouveau la pratique instrumentale soit ouverte à tous selon ses envies. Y compris quand ces envies sont d’apprendre à la fois le cor anglais et le trombone à coulisse. Alors certes, ce renforcement du conservatoire aura un coût. Forcément, puisqu’il passe par l’embauche de professeurs supplémentaires. Et alors ? La ville (à l’instigation de son maire Dord et de sa majorité) sait parfois faire usage de l’argent des aixois sans trop regarder à la dépense. Quid par exemple des 40.000 euros consacrés il y déjà quelques années à une étude pour la suppression du passage à niveau de l’avenue de Tresserve par exemple (passage à niveau toujours en place à ce jour) ? Quid encore des 65.000 euros dépensés pour l’étude d’aménagement du front de lac (qui faisait suite à une précédente étude sur le même sujet) qui n’a débouché sur pas grand-chose si ce n’est sur l’ineptie du projet d’érection d’une tour de 80m au Grand Port ? Quid encore de ces centaines de milliers d’euros versés chaque année en subvention à la société privée organisatrice du Musilac ? Quid des ristournes accordées aux promoteurs sur la vente de terrains municipaux (ristournes qui, cumulées, doivent bien dépasser aujourd’hui le million d’euros) ? Quid de l’explosion du budget d’assistance juridique (115.000 euros hors taxes par an aujourd’hui contre 12.325 euros en 2002 !) ? Quid des 300.000 euros indûment versés par la ville à un satellite de Léon Grosse et dont Dord se refuse à réclamer le remboursement bien que le tribunal administratif ait jugé ce paiement comme étant « sans fondement légal » ?

On le voit au travers de ces nombreux exemples, pris parmi d’autres, de l’argent il y en a. Mais ce qui échappe aux aixois, c’est l’usage que la municipalité en fait. Et dans ce domaine, la priorité ne semble pas être au financement des services aux aixois.


LE MOT DE LA (PRESQUE) FIN
En forme de calcul. Prenons les fameux 300.000 euros versés « sans fondement légal » à une société privée pour l’aménagement de son domaine privé. Prenons un professeur de musique payé 3.000 euros par mois. Ajoutons les charges sociales. Au final, on voit qu’avec ces 300.000 euros, il y a de quoi payer six professeurs supplémentaires pendant un an. De quoi assurer 3.888 heures de cours supplémentaires chaque année. Soit 7.776 cours individuels en plus (chaque cours durant ½ heure).

On peut aussi se dire qu’il y de quoi payer deux professeurs supplémentaires pendant trois ans. De quoi assurer 2.592 cours individuels supplémentaires chaque année.

Alors on vous laisse imaginer (calculer) tout ce qui pourrait être fait pour les aixois au conservatoire en ne prélevant qu’une partie des millions qui partent chaque année « en fumée » (avec les guillemets car ces millions ne sont pas perdus pour tout le monde).

 

LE MOT DE LA (VRAIE) FIN

Empêcher les élèves du conservatoire de suivre plus d’un cours individuel parce qu’il y a trop de demandes, au lieu de mettre des enseignants supplémentaires, c’est un peu comme si demain on autorisait les aixois à ne prendre le bus qu’un jour sur deux (en fonction de la parité de leur jour de naissance par exemple) plutôt que d’accroitre le nombre de bus si ceux-ci se trouvaient eux aussi victimes d’une demande trop forte.

Ca, c’est le signe d’une ville qui n’est pas administrée, mais managée1 comme une entreprise. C’est le signe d’une commune ou la logique économique prend le pas sur le bien-être des habitants. C’est le signe d’une ville où tous les services publics disparaissent un à un (chirurgie, maternité, tribunal, thermes, maternité, éclairage public) et où sont qui restent ne sont vus que comme des centres de coût.

 

 

DERNIERE MINUTE

Suite aux mesures de restriction prise unilatéralement et en accord avec lui-même par le directeur du conservatoire, il semblerait que certains professeurs se retrouvent ... en manque d'élèves. Car si les classes des instruments les plus prisés (piano, guitare et violon) affichent toujours complets, ce n'est pas le cas pour celles d'autres instruments. On pense par exemple aux classes de basse, contrebasse, chant. Des classes où étaient inscrits de nombreux élèves les fréquentant en tant que second instrument.

 

 

 


1 On emploie à dessein la version anglicisée de gérée, car il ne fait pas de doute que c’est outre-Atlantique, dans les Etats-Unis libéraux, que l’UMP va puiser son inspiration, et surtout son aversion à tout ce qui ressemble de près ou de loin à un service public.

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commentaires

G
<br /> <br /> http://critipolemik.blog.fr/2010/09/20/du-rififi-au-conservatoire-de-musique-suite-9423640/<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Désolé mais bien cordialement.<br /> <br /> <br /> Hervé Gallien<br /> <br /> <br /> <br />
Répondre
A
<br /> <br /> Pas de quoi être désolé. Au contraire, c'est bien que chacun puisse exprimer son point de vue. Ca nous change des "débats" monolithiques (monoli-toc-s ?) de la "vie" politique aixoise (pas si<br /> vivante que ça), et de son système de pensée unique.<br /> <br /> <br /> Lien vers votre article : http://critipolemik.blog.fr/2010/09/20/du-rififi-au-conservatoire-de-musique-suite-9423640/<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br />
V
<br /> <br /> 2010 centenaire de la naissance de Pierre Schaeffer, inventeur de la musique concrète.<br /> <br /> <br /> <br />
Répondre
A
<br /> <br /> http://fr.wikipedia.org/wiki/Musique_concrète<br /> <br /> <br /> <br />